Contestations, appropriations et productions de savoirs par les femmes : Réflexions sur les catégories d’analyse d’un champ de recherche émergent

Abstract

Longtemps négligés par la recherche sur le militantisme, les mouvements sociaux pour la santé commencent à intéresser les études de l'action collective dans les années 1990, notamment via les travaux consacrés aux luttes environnementales et contre le VIH. Le mouvement états-unien pour la santé des femmes devient alors un objet d'étude de plus en plus considéré, ce qui se traduit dans les années 2000-2010 par la publication de cinq monographies et de nombreux articles. Cet intérêt se retrouve également dans d'autres champs de recherche, notamment en histoire et en sociologie de la médicine, avec des analyses qui portent autant sur l'évolution de la relation patient/médecin que sur l'implication des profanes dans la médecine. Le fait que ces littératures se concentrent sur l'engagement de femmes pour la santé sexuelle et reproductive renvoie à une réalité genrée maintes fois constatée : les femmes, ainsi que les hommes qui ne correspondent pas aux normes de la masculinité (les homosexuels notamment), sont majoritaires dans ces mobilisations. Cela s'explique non seulement par la division genrée du travail qui assigne les femmes aux tâches de soin dans l'espace domestique, mais aussi par l'histoire de la domination médicale, qui s'est notamment établie à travers un processus de médicalisation du corps et de la sexualité des femmes et des déviant·es du sexe, du genre et de la sexualité. En France comme en Allemagne, un champ de recherche interdisciplinaire émerge sur les questions de santé reproductive et sexuelle, approchées depuis une perspective genrée et articulées avec un questionnement sur les mobilisations de patiente…